Jacques Brel - Orly /1977
Albumm:Les Marquises/1977
Ils sont plus de deux mille
Et je ne vois qu’eux deux
La pluie les a soudes,
Semble-t-il, l’un a l’autre
Ils sont plus de deux mille
Et je ne vois qu’eux deux
Et je les sais qui parlent
Il doit lui dire « Je t’aime! »
Elle doit lui dire « Je t’aime! »
Je crois qu’ils sont en train
De ne rien se promettre
Ces deux-la sont trop maigres
Pour etre malhonnetes
Ils sont plus de deux mille
Et je ne vois qu’eux deux
Et brusquement, il pleure
Il pleure a gros bouillons
Tout entoures qu’ils sont
D’adipeux en sueur
Et de bouffeurs d’espoir
Qui les montrent du nez
Mais ces deux dechires
Superbes de chagrin
Abandonnent aux chiens
L’exploit de les juger
La vie ne fait pas de cadeau
Et nom de Dieu c’est triste
Orly, le dimanche,
Avec ou sans Becaud!
Et maintenant, ils pleurent
Je veux dire tous les deux
Tout a l’heure c’etait lui
Lorsque je disais "il"
Tout encastres qu’ils sont
Ils n’entendent plus rien
Que les sanglots de l’autre
Et puis
Et puis infiniment
Comme deux corps qui prient
Infiniment, lentement,
Ces deux corps se separent
Et en se separant
Ces deux corps se dechirent
Et je vous jure qu’ils crient
Et puis, ils se reprennent
Redeviennent un seul
Redeviennent le feu
Et puis, se redechirent
Se tiennent par les yeux
Et puis, en reculant
Comme la mer se retire,
Il consomme l’adieu
Il bave quelques mots
Agite une vague main
Et brusquement, il fuit
Fuit sans se retourner
Et puis, il disparait
Bouffe par l’escalier
La vie ne fait pas de cadeau
Et nom de Dieu c’est triste
Orly, le dimanche,
Avec ou sans Becaud!
Et puis, il disparait
Bouffe par l’escalier
Et elle, elle reste la
Cceur en croix, bouche ouverte
Sans un cri, sans un mot
Elle connait sa mort
Elle vient de la croiser
Voila qu’elle se retourne
Et se retourne encore
Ses bras vont jusqu’a terre
Ca y est! Elle a mille ans
La porte est refermee
La voila sans lumiere
Elle tourne sur elle-meme
Et deja elle sait
Qu’elle tournera toujours
Elle a perdu des hommes
Mais la, elle perd l’amour
L’amour le lui a dit
Revoila l’inutile
Elle vivra de projets
Qui ne feront qu’attendre
La revoila fragile
Avant que d’etre a vendre
Je suis la, je la suis
Je n’ose rien pour elle
Que la foule grignote
Comme un quelconque fruit